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vendredi 8 juin 2012

A Châtellerault, la division à gauche profitera-t-elle au Front national ?

Un sortant ex-soutien de Nicolas Sarkozy en difficulté, une candidate Europe Ecologie investie par le PS mais contestée par un dissident, une possible triangulaire avec le Front national : la circonscription de Châtellerault-Loudun concentre toutes les problématiques de ces élections législatives 2012.

A Lencloître, bourgade à 20 km à l’ouest de Châtellerault, le premier lundi du mois est synonyme de foire. Une foire qui a cinq siècles d’histoire, une foire à l’ancienne avec sa spécialité d’anguille grillée, que les bœufs ont déserté depuis les années 80 mais où pintades et canards s’échangent toujours par-dessus l’étal. Bien vivant naturellement. Rassemblant selon les mois de 300 à 350 commerçants, elle draine des milliers de personnes. Chaussures, vêtements ou tourteau fromager – autre spécialité locale – on y trouve de tout. Y compris des politiques, pour qui le lieu est incontournable en cette période préélectorale.

Tracts en mains, ils arpentent les allées, certains depuis des mois. L'héritier d'une longue histoire Il y a là, le député sortant Jean-Pierre Abelin, 62 ans. Étiqueté Nouveau Centre, désireux déçu d’une candidature de Jean-Louis Borloo, il a été d’un soutien discret mais indéfectible à la politique de Nicolas Sarkozy. A coups redoublés de poignées de main et de tapes dans le dos, il mise aujourd’hui sur son bilan local et évite prudemment les sujets nationaux.  
Elu sans discontinuer depuis 1993, il est l’héritier d’une longue histoire : son père Pierre Abelin, député maire de Châtellerault, secrétaire d’Etat multicartes sous la IVe République, ministre sous Giscard, a marqué de son empreinte le territoire, suivi à la mairie par son épouse Geneviève à sa mort en 1977. Cet enracinement c’est à la fois la force et la faiblesse de Jean-Pierre Abelin. Ses adversaires comptent bien lui faire payer son ancienneté dans la fonction et son incapacité à enrayer une crise symbolisée par les conflits de New Fabris et de la Fonderie du Poitou.
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  Jean-Pierre Abelin (à droite) avec le candidat du Front de Gauche Pierre Baraudon.

 Une Verte candidate officielle du PS 
Entre les étals, il y a aussi Véronique Massonneau. Banquière de son état, militante verte, elle est la candidate officielle du Parti socialiste, à la faveur de l'accord signé au niveau national. Présente pour la troisième fois à une élection législative – mais pour la première fois avec l'étiquette socialiste – elle se verrait bien surfer sur la vague déclenchée par François Hollande le 6 mai dernier, arrivé en tête sur la circonscription. Mais le score national d'Eva Joly et le peu de notoriété de la candidate locale mis en exergue par ses détracteurs, font craindre le pire à la gauche départementale.  

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Véronique Massonneau, candidate officielle PS-EELV.  

Un socialiste dissident en embuscade 
Des craintes qui ont poussé un « vrai » socialiste à sortir du bois bien avant le premier tour de la présidentielle. Maire d’une commune voisine de Châtellerault, Christian Michaud a décidé de jouer sa carte personnelle en se présentant contre l’accord. « Nous, on a la rose dans notre pochette (sic), explique celui qui a été exclu du Parti socialiste. Ce ne sont pas les décisions prises par quelques Parisiens qui vont changer les choses. On doit respecter les militants socialistes locaux qui m'ont apporté leur soutien et les électeurs qui ont voté François Hollande et pas Europe Écologie. Ils ne comprendraient pas qu'on ne soit pas là " A l’entendre, il serait le seul capable de renverser le député-sortant et d’apporter un soutien efficace à François Hollande. Il bénéficie en outre du jeu trouble des socialistes locaux.  
Beaucoup ont affiché clairement leur soutien au dissident mais ont dû rentrer depuis dans le rang, en apparence du moins, après les remontrances des instances nationales. Certains voient dans ces revirements les manigances d’Edith Cresson. Ancienne maire de Châtellerault, l’ex-Premier ministre joue toujours son rôle dans la section socialiste locale.
Assurant le service minimum, elle appelle aujourd’hui à respecter l’accord national dans la crainte « d’un bon score du Front national ». Mais son rôle dans la campagne, visible lorsqu'elle soutenait Christian Michaud, est des plus réduits: mercredi dernier, elle était notamment absente du grand meeting de Véronique Massonneau qui réunissait pourtant David Assouline, porte-parole du PS, et Pascal Canfin, ministre du développement. Se contentant faute de mieux du soutien du PS local, Véronique Massonneau déplore cette division: "Sur les marchés, dans les meetings, on ne me parle que de ça. Le programme, les idées, on ne peut pas les aborder."  
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Christian Michaud, candidat dissident socialiste.

 La crainte d'une triangulaire 
Car c’est en effet, avec cinq candidats à gauche, le risque d’un 21 avril local que pressentent certains. La gauche absente du second tour ? Eric Audebert, candidat du Front national, y croit dur comme fer. "Le FN, ça fait des années que les autres partis le méprisent, explique-t-il. Aujourd'hui, ils viennent " draguer " nos électeurs et font mine de s'intéresser à nos idées… Aux législatives, on sera là. Et à mon avis, tout est jouable ! » Ici, notamment dans la région de Lencloître, Marine Le Pen est arrivée en tête. Aux dernières cantonales, le candidat frontiste s’était aussi qualifié pour le deuxième tour dans le Sud de Châtellerault. Autant d’éléments qui inquiètent certains analystes même si le seuil de 12,5 % conjugué à une abstention annoncée plus importante que pour la présidentielle rendraient difficile une présence au deuxième tour. Le 21 avril 2002, c’est pourtant bien avec une abstention record que Jean-Marie Le Pen avait franchi le premier tour…

La quatrième de la Vienne, une circonscription bicéphale 
Quoi de commun entre Châtellerault et Loudun, les deux cités de la quatrième circonscription de la Vienne? Pas grand chose à première vue. Entre la terre d'élection d'Edith Cresson et le berceau de René Monory, les différences sont multiples. Le Châtelleraudais est marqué par une image industrieuse, notamment par son ancienne manufacture d'armes, fermée en 1968. Les armes ont depuis été remplacées par l'automobile et l'avion avec de grandes entreprises comme Magneti-Marelli, Valéo, Snecma ou Thalès. Le Loudunais reste majoritairement rural avec une forte proportion d'agriculteurs. Des différences qui se retrouvent aussi au niveau politique. Si Châtellerault a donné plus de 56% de ses suffrages à François Hollande au deuxième tour de la présidentielle, Loudun a conservé sa confiance à Nicolas Sarkozy à 53%.  

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